Claire Hédon, qui dirige l’organisme autonome, observe qu’en dépit de nombreuses sollicitations, la situation concernant la protection de l’enfance « s’empire ». Elle souligne également les impacts négatifs « sur les conditions de vie des enfants ».
Renforcer l’aide financière pour les départements, augmenter le nombre d’assistants sociaux dans les écoles, et améliorer les ressources de la justice… Claire Hédon, la Défenseure des droits, interpelle les autorités dans une décision diffusée jeudi, et annoncée par l’AFP dès le mercredi 29 janvier, afin de mettre en lumière les « graves défaillances » constatées dans le système de protection de l’enfance.
Dans sa « décision-cadre » comptant plus de 60 pages, cette institution indépendante souligne que malgré de nombreuses alertes, la situation de la protection de l’enfance « se détériore, avec une intensité accrue ces dernières années », affectant « très négativement la condition des enfants ». En décembre, Emmanuel Macron a annoncé l’établissement d’un haut-commissariat à l’Enfance. Toutefois, aucune information détaillée sur le champ d’action de ce haut-commissariat, ses compétences, son éventuelle autorité sur certaines administrations, ou son financement n’a encore été révélée.
L’organisation présente plus d’une trentaine de recommandations dans sa décision publiée un an après le décès tragique de Lily, une adolescente de 15 ans, retrouvée pendue dans un hôtel où elle avait été confiée par l’aide sociale à l’enfance. D’après les statistiques officielles actuelles, environ 390 000 enfants bénéficient d’une mesure de protection dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance (ancienne Ddass). Claire Hédon, qui veille à garantir les droits des enfants, presse le gouvernement de « préciser les mesures adoptées » en réponse à ses recommandations dans un « délai de quatre mois ».
« Doter la justice des moyens nécessaires pour remplir sa mission »
A propos du financement de la protection de l’enfance, domaine confié aux départements depuis les lois de décentralisation des années 1982 et 1983, la Défenseure des droits recommande à l’État de « compenser les charges induites par les nouvelles obligations imposées aux départements, et d’augmenter significativement la part de son budget consacrée aux solidarités ». En parallèle, elle insiste sur la nécessité de « fournir à la justice les moyens suffisants pour jouer son rôle » dans la protection des enfants. Le manque de financements adéquats et de professionnels disponibles entraîne des délais de jugement ou de réalisation des enquêtes sociales qui sont jugés largement « insatisfaisants », selon elle.
Au niveau de la prévention, la Défenseure des droits juge qu’il « est impératif » d’agir pour instaurer un « service social scolaire robuste », « y compris dans les écoles élémentaires ». Elle recommande aussi d’inclure dans la formation initiale des enseignants des modules consacrés à « la protection de l’enfance, aux droits de l’enfant, et à la lutte contre toutes les formes de violences ». Dans une situation de crise, « la tentation est grande de multiplier à la hâte des solutions partielles déficientes et d’adopter des réflexes défensifs », observe l’institution.
La Défenseure des droits exprime également ses préoccupations concernant les « problèmes d’accès aux soins en santé mentale » pour les enfants concernés. Ces jeunes, « dont les symptômes peuvent découler de troubles de l’attachement développés dans les premières années de la vie, subissent malheureusement souvent des interruptions de parcours et des redirections fréquentes », remarque-t-elle. Par ailleurs, elle appelle à élargir l’implantation des unités d’accueil pédiatrique pour les enfants en danger.