La question technologique du moment concerne le vote par voie électronique, qui offre la chance de prendre part à une élection de n’importe où grâce à internet. En France, ce système reste en phase d’essai, contrairement à l’Estonie où le vote numérique est en place et fonctionnel depuis près de deux décennies.
Le surnom de « Estonie électronique » (ou e-Estonie) a été attribué à cette nation balte de 1,3 million d’habitants après qu’elle a introduit le vote en ligne en 2005. Le système a d’abord été utilisé pour les élections municipales, puis pour les législatives en 2007 et finalement pour les élections européennes. Lors des dernières élections législatives, il y a cinq mois, plus de la moitié (51%) des électeurs estoniens ont exercé leur droit de vote en ligne.
Afin d’assurer la sécurité du vote en ligne, le système est mis à l’épreuve avant chaque élection. Le code source du logiciel de vote est public et ouvert à tous pour examen. Des experts en cybersécurité sont sollicités pour chercher et identifier d’éventuelles failles de sécurité. Les électeurs en Estonie ont la possibilité de voter pendant une période de dix jours. Ils ont la liberté de voter plusieurs fois et de modifier leur choix, chaque vote étant signé numériquement et horodaté. Seul le dernier vote émis électroniquement est pris en compte.
Authentification et signature électroniques
Chaque électeur est identifié par une carte d’identité électronique munie de deux codes secrets, utilisés notamment pour apposer sa signature électronique. Cependant, malgré la facilité d’accès au vote, la participation électorale en Estonie n’a pas augmenté, ce qui était pourtant un des principaux objectifs visés.
Aux États-Unis, pays observé de près, le président Joe Biden brigue un second mandat en 2024. Dans ce pays, le vote en ligne n’est pas utilisé ; à la place, des machines électroniques sont mises à la disposition des électeurs. Cependant, les élections de mi-mandat de l’année dernière n’ont pas nécessairement confirmé la fiabilité de ces machines : en Arizona, par exemple, 20% des machines ont subi une panne technique. De plus, il est à noter que chaque État américain établit ses propres règles de vote et qu’il n’existe pas de système de vote uniforme à l’échelle nationale. Il n’y aura pas de vote en ligne lors des prochaines élections, les Américains ne disposant pas d’équivalent électronique de la carte d’identité. Comme le montre l’exemple estonien, c’est un prérequis essentiel à l’implantation du vote en ligne.
Deux défis à relever : la sécurité et la confiance
Il reste encore de l’espoir pour la mise en place d’un système de vote en ligne en France. La nouvelle carte d’identité numérique proposée par France Identité, qui devrait être lancée prochainement, pourrait, en théorie, constituer la base d’un système de vote sûr et fiable, en liaison avec la technologie de la Blockchain. Selon Bertrand Peaudecerf, directeur recherche et innovation du groupe Tessi : « Technologiquement, le vote électronique aux élections pourrait être une réalité en France dans trois à cinq ans. Tout dépendra ensuite de l’évolution des perceptions et de la confiance du public. »
Dans les trois prochaines années, on estime que cinq millions de Français auront l’opportunité de voter en ligne dans le cadre de leur administration ou entreprise, notamment pour élire leurs représentants du personnel.