Au mois de décembre dernier, la Bosnie-Herzégovine s’est vue accorder le statut de candidat à l’adhésion à l’Union européenne. Cependant, la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg a émis une nouvelle déclaration, mettant en évidence le fait que la Bosnie-Herzégovine favorise certains groupes ethniques et que les processus électoraux dans le pays sont antidémocratiques. Cette décision soulève donc de nouvelles interrogations quant à la légitimité de l’aspiration de la Bosnie-Herzégovine à rejoindre l’Union européenne.
Aline Cateux, anthropologue et correspondante du quotidien « Le Soir » à Sarajevo, est l’invitée de « Micro européen ». Elle explique que la Bosnie-Herzégovine est un pays composé de trois peuples : les Bosniaques (musulmans), les Croates et les Serbes (catholiques et orthodoxes). Chacun de ces peuples a son propre président et seul ces trois peuples peuvent être représentés dans la chambre haute du pays. Le pays est divisé en deux territoires, celui des Bosniaques et des Croates, et celui des Serbes, également connu sous le nom de Republika Srpska. Cette organisation politique est appelée « présidence tripartite ».
En décembre dernier, la Bosnie-Herzégovine a obtenu le statut de candidat à l’adhésion à l’Union européenne. Cependant, un Bosnien du nom de Slaven Kovačević a porté plainte devant la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg car il estime ne pas être représenté.
La Cour européenne des droits de l’homme a jugé que la Bosnie-Herzégovine favorisait certains groupes ethniques et que les élections dans le pays étaient antidémocratiques. Aline Cateux explique que cela n’est pas nouveau car c’est la sixième fois que la Cour condamne la Bosnie-Herzégovine, que ce soit pour sa constitution discriminatoire ou pour les droits bafoués des minorités, tels que les Juifs et les Roms qui ne peuvent pas accéder aux fonctions gouvernementales. Selon la constitution, seuls les trois peuples constitutifs sont éligibles à ces fonctions.
Depuis les accords de Dayton de 1995, la Bosnie-Herzégovine a un haut représentant international qui est chargé de superviser ces accords.
La décision de la Cour européenne remet en question le statut de candidat de la Bosnie-Herzégovine à l’adhésion à l’Union européenne. Aline Cateux souligne que la Bosnie-Herzégovine n’a pas montré de progrès dans sa candidature.
La réaction de l’Europe et de la communauté internationale face à cette décision de la Cour européenne est mitigée. Certains essaient de minimiser cette décision en mettant en avant la fonctionnalité de l’État et les progrès réalisés dans la candidature à l’Union européenne. Les États-Unis et la Grande-Bretagne ont également soutenu cette position.
Dans toute la Bosnie-Herzégovine, cette décision de la Cour européenne a suscité beaucoup de discussions. Elle vient s’ajouter aux constats préexistants selon lesquels les élections sont manipulées et la commission électorale est contrôlée par les partis politiques. Les Bosniens prennent conscience de l’importance de l’égalité et de leurs intérêts communs, tels que l’éducation, les soins de santé et l’accès à l’emploi, sans avoir à appartenir à un parti politique ou à un groupe ethnique.
Concernant la décision de la Cour européenne des droits de l’homme, les Bosniens ne se font pas d’illusions. Ils ne comptent plus sur l’Union européenne, les dirigeants ou les ambassades pour défendre leurs droits. Ils sont reconnaissants envers la Cour européenne d’avoir reconnu la discrimination et le caractère non démocratique des élections, mais ils sont conscients que cette décision n’aura aucune conséquence sur place et qu’elle ne sera pas mise en application, tout comme les décisions précédentes de la Cour européenne.