En cette journée dominicale du 24 septembre, se déroule une importante activité électorale. Certes, la majorité de nous n’est pas impliquée, mais les grands électeurs, eux, participent activement en votant lors des élections sénatoriales. Il s’agit là d’un événement crucial puisque la moitié des sièges du Sénat, souvent désigné comme « la chambre haute », sont à renouveler. Cette façon de procéder relève du suffrage universel indirect, un concept sociétal complexe. Pour nous aider à comprendre les enjeux et les mécanismes, le sociologue Jean Viard partage son expertise et son analyse.
Ce dimanche 24 septembre, c’est le rendez-vous des grands électeurs pour renouveler la moitié des sièges du Sénat, aussi désignée comme la chambre haute. Constitués des députés, sénateurs, conseillers régionaux et départementaux, et surtout les conseillers municipaux, ces grands électeurs opèrent par un suffrage universel indirect. Cette procédure n’attire cependant pas l’attention des Français, probablement parce qu’ils ne sont pas tous invités à se prononcer. Jean Viard, sociologue, nous livre son analyse et son avis sur la situation.
franceinfo : Est-ce logique que les Français, pour la plupart, s’intéressent peu à ces élections sénatoriales car ils ne votent pas ?
Jean Viard :
On a en effet peu parlé des élections sénatoriales dans les médias, sauf quand le roi d’Angleterre s’est rendu au Sénat cette semaine. On aurait pu penser qu’il s’agissait d’un échange de courtoisies entre deux institutions anciennes, le Sénat et la monarchie britannique. Cependant, le Sénat est à l’origine l’entité qui représente les communes, avec une représentation démesurée des zones rurales. C’est ce qui explique que le Sénat ait souvent une tendance conservatrice, les campagnes étant généralement plus « conservatrices » que les villes.
Le Sénat paraît comme une institution opposée au monde urbain de par sa représentation. Cela remonte à une époque où les régions rurales étaient plus peuplées, et où les 36.000 communes françaises comptaient plus d’habitants. Malgré une apparence vieillissante, et même si cela évolue avec l’intégration de plus de femmes, le Sénat est un lieu de réflexion intense, notamment au sein de ses commissions.
L’enjeu est de comprendre ce que signifie le fonctionnement du Sénat dans notre monde actuel. La plupart des grandes démocraties se basent sur le système bicaméral pour équilibrer les décisions. Cela permet notamment de contrebalancer le poids des hommes par le poids des territoires. Il est logique que des zones peuplées de seulement 380.000 agriculteurs et de petits villages ruraux aient un poids important dans notre société, car ces territoires sont responsables de notre alimentation, de la protection des écosystèmes et représentent la majorité de notre territoire. Malgré de nombreux débats, personne n’a encore modernisé le modèle du Sénat.
Dans le climat actuel où l’Assemblée est le terrain de batailles dignes d’une cour de récréation, le Sénat apparaît comme un lieu sérieux et réfléchi. Cela profite à ses élus, à commencer par le président du Sénat qui incarne bien ce modèle. C’est un reflet de la France d’aujourd’hui et cela reste toujours sujet à débat.
Que penser de ces élections effectuées au suffrage universel indirect, une pratique peut-être désuète ?
Il est indéniable que nous avons coupé les ponts entre les élus locaux et ceux au niveau national. Pour l’Assemblée nationale, cela a été bénéfique. Quant au Sénat, la question reste ouverte. Personnellement, je pense que si le Sénat réunissait les présidents des conseils généraux, des régions et des villes de plus de 100.000 habitants, cela renforcerait le lien avec la République. Le Sénat pourrait ainsi se concentrer sur les questions territoriales, voire les accords internationaux, sans avoir à revoter sur tous les sujets et à dupliquer l’Assemblée nationale. Le débat reste ouvert.
Le regroupement des grands élus, qui représentent en fait le pouvoir des villes, des départements et des régions, est crucial pour notre organisation démocratique et républicaine. Je ne suis pas choqué par le principe de deux organisations, mais certaines communes ne comptant que 15 habitants votent quand même pour le Sénat…