La réalisation cinématographique du belge Claude Schmitz, dont la sortie en cinéma est prévue pour le mercredi 4 octobre, nous plonge dans une investigation complexe traitant de la recherche identitaire, de la structure familiale patriarcale ainsi que de la refonte personnelle. Le ton du film oscillera entre humour et mélancolie.
Imaginez un film d’action de l’Ouest moderne, se déroulant entre Perpignan, la limite territoriale espagnole et la région de la Dordogne, agrémenté d’un tableau de personnages à la fois extravagants et émouvants, des dialogues mordants, l’ensemble dirigé par le réalisateur belge Claude Schmitz, et vous voilà pour une plongée dans le monde de L’Autre Laurens. Un tourbillon de pensées qui flirte avec les standards du néo-noir, une expérience à savourer en cinéma à partir du mercredi 4 octobre.
Le film dépeint un détective privé, des motards aux allures mi-anges, mi-diables, des policiers corrompus, des trafiquants de narcotics, une veuve manipulatrice et une adorable poupée. Ces personnages surréalistes sortent directement d’un drame de série B américain que le scénario ballade dans les territoires cinématographiques d’auteur européen. « J’avais l’intention de composer quelque chose à partir de cette schizophrénie créative« , confie le réalisateur en décrivant la genèse de son histoire. Puis il ajoute : « j’ai voulu inclure de l’ironie et je n’ai certainement pas voulu du cynisme, j’ai cherché à investir les modèles du film noir« .
Les spectres de Laurens
Gabriel Laurens, le détective privé, est incarné par l’époustouflant et trop rarement vu, Olivier Rabourdin. Un type d’antihéros au visage érodé qui nous captive instantanément. Avec une cinquantaine d’années bien visibles, des cheveux hirsutes, un visage fatigué, Gabriel se préoccupe plus de la mort de sa mère que d’un éventuel flagrant délit d’adultère.
Sauf qu’il n’avait pas prévu le retour abrupt de sa nièce, Jade. Une blonde explosive avec une moue renfrognée à la manière de Brigitte Bardot, brillamment interprétée par la jeune étoile montante, Louise Leroy. Elle irrupte sans prévenir dans sa vie et demande de mener une enquête sur la mort de son père, le frère jumeau de Gabriel. Mais ces jumeaux sont très différents. François (le défunt) s’est installé dans un château du sud de la France – un manoir dominé par le kitsch et surnommé « La Maison blanche » – tandis que Gabriel s’empêtre dans ses dettes en Belgique.
Quand Jade arrive, la routine de Gabriel est brutalement perturbée par l’image effrayante de François. En effet, des spectres, des faux-semblants et des phénomènes surnaturels constituent une grande partie du film. Ce sujet est cher au metteur en scène dont les travaux théâtraux sont alimentés par une fascination pour les pièces de William Shakespeare, notamment Hamlet.
Personnages extravagants, dialogues savoureux
À côté des débats oratoires intenses entre Jade et Gabriel, L’Autre Laurens se délecte aussi par une gamme délicieuse de personnages. Il y a par exemple un groupe de motards qui errent sur leurs motos dans le désert, des faux méchants dont les visages lugubres se métamorphosent en faciès d’anges. L’un d’eux est chargé de protéger Jade, et on le surprend à raconter une histoire à la jeune fille. Une sorte de conte de fées au dénouement effrayant raconté avec une voix douce.
Le binôme de policiers, incarné par Rodolphe Burger et Francis Soetens, est aussi délectable. Comme des Dupont/Dupond occitans, leurs répliques provoquent des éclats de rire, rappelant le style d’un certain Michel Audiard. « Un cadavre, parfois ça se cache par timidité, mais ça finit toujours par réapparaître« .
Plusieurs points d’entrée
À la frontière du film de genre, Claude Schmitz se risque dans une dramaturgie un peu plus complexe par rapport à ses films précédents. « J’avais l’envie de réaliser un film sur la trahison des pères dans un sens large« , dit-il. Avec ce troisième opus, le réalisateur se divertit à rendre les choses floues (quitte à perdre légèrement le spectateur) tout en examinant des thématiques de la société actuelle. Il s’évertue autour du patriarcat, de la condition féminine, de l’altérité, de la reconstruction et de l’identité. « Il y a manifestement une critique dans le film, mais il y a aussi beaucoup de mélancolie, pour moi, ça raconte la fin d’un monde avec des hommes âgés qui reproduisent des stéréotypes et au milieu de ça, il y a le personnage de Jade, qui reflète un peu moi-même« , confie-t-il.
Fiche du film
Genre : Policier, Thriller
Scénario : Claude Schmitz et Kostia Testut
Pays : Belgique et France
Durée : 1h57
Sortie : 4 octobre 2023
Distributeur : Arizona Distribution
Synopsis : À la demande de sa nièce, un détective privé plutôt spécialisé dans les affaires d’adultère se trouve impliqué dans l’investigation sur la mort mystérieuse de son frère jumeau, avec qui il avait coupé les ponts. Il se dirige vers la demeure flamboyante du défunt proche de la frontière franco-espagnole, où gravitent toutes sortes de personnages louches : une veuve américaine blasée, un pilote d’hélicoptère ancien marine, des Hells Angels vieillissants à l’accent méridional, des policiers corrompus à la recherche d’un gitan disparu.