L’administration avait jusqu’à la fin de la journée de mardi pour renouveler le mandat d’Anticor, chose qu’elle n’a pas accomplie. « Il est clair pour nous que nos efforts pour lutter contre la corruption déplaisent fortement à l’État », suppose l’organisme.
L’agrément d’Anticor, l’association de lutte contre la corruption, n’a pas été reconduit par le gouvernement. L’entité anti-corruption attendait une réponse à sa sollicitation avant la date butoir du 26 décembre, à la suite de la résiliation du précédent agrément par le tribunal administratif de Paris. Selon Élise Van Beneden, la présidente d’Anticor : « Il s’agit d’un refus tacite après six mois d’examen par la Direction des affaires criminelles et des grâces, sans aucune accusation portée contre nous ». Cette information a été validée par une source diplomatique à France Inter.
« Nous ne sommes tristement pas étonnés de cette décision car nous comprenons bien que nos actions contre la corruption dérangent grandement le gouvernement », a-t-elle déclaré à 42mag.fr.
Mardi 26 décembre, peu avant minuit, l’association a posté ce commentaire sur le réseau social X : « Il reste 20 minutes pour le Quai d’Orsay pour renouveler l’agrément d’Anticor ». Cependant, après minuit, l’association n’a reçu aucune réponse, comme elle l’a indiqué dans une autre publication. Le matin du 27 décembre, aucune information concernant l’agrément d’Anticor n’était indiquée dans le Journal officiel. Élise Van Beneden regrette ce « refus tacite » qui survient « après six mois d’évaluation pendant lesquels aucun dysfonctionnement nous a été reproché par le gouvernement, et ce malgré le fait que la Première ministre a jugé en octobre dernier qu’Anticor remplissait toutes les exigences pour être accréditée ».
Elle a annoncé que l’association va « contester cette décision devant le tribunal administratif ». Selon Mme Van Beneden, « il est positif que la justice soit la seule à décider si Anticor respecte les conditions pour être accréditée », ajoutant que cela permet de « mettre fin à l’arbitraire auquel nous sommes confrontés depuis trois ans ».
« Cette décision est attristante car elle représente un obstacle à l’action de centaines de bénévoles qui lutte contre les abus de pouvoir partout en france »
Élise Van Beneden, présidente d’Anticorsur 42mag.fr
L’agrément permet à Anticor de s’engager dans des cas de lutte contre la corruption présumée. Sans cet aval, l’association ne peut plus se constituer partie civile – une procédure importante qui permet de contourner la décision d’un procureur, dont la carrière dépend du gouvernement, de ne pas poursuivre une affaire politico-financière délicate, explique la présidente d’Anticor.
« En se constituant partie civile, Anticor récupère un dossier politico-financier sur le bureau du procureur pour le porter devant un juge d’instruction indépendant, constitutionnellement parlant », ajoute Élise Van Beneden. C’est crucial car cela « permet de mettre fin à l’impunité et de promouvoir l’égalité devant la loi en proclamant haut et fort que les élus ne sont pas au-dessus des lois et qu’ils doivent rendre des comptes à la justice et par le biais de celle-ci, aux citoyens », conclut la présidente d’Anticor dans un message à 42mag.fr.
« Cette décision ne remet aucunement en question la détermination de la France à lutter contre la corruption », affirme une source diplomatique sur France Inter. Il explique que la présence d’un parquet spécialisé offrant toutes les garanties d’indépendance, d’organismes, de services d’enquête et de renseignement spécialisés en atteste largement, ajoutant que « la possibilité pour cette association, comme pour d’autres, de signaler des dossiers à la justice et de déposer plainte reste la même ».