Malgré le fait que le gouvernement ait intégré plusieurs propositions du Rassemblement national dans le budget de 2025, Marine Le Pen continue de mettre la pression sur Michel Barnier en menaçant de pousser ses députés à voter une motion de censure contre son gouvernement.
Pour tenter de contourner une censure imminente, le gouvernement intensifie ses efforts pour modifier son budget de 2025. En effet, le Rassemblement national menace de faire tomber le gouvernement si Michel Barnier et son équipe n’ont pas répondu d’ici lundi à ce qu’ils désignent comme des « lignes rouges », a déclaré Marine Le Pen jeudi.
Pour le moment, le RN prévoit de soutenir une motion de censure, a affirmé Sébastien Chenu, vice-président du RN. « Nous n’avons pas l’intention de lui faire de faveur », a-t-il averti vendredi 29 novembre sur 42mag.fr, qualifiant les concessions du gouvernement de « bricolage ».
Les taxes sur l’électricité resteront inchangées
« J’ai choisi de ne pas accroître les taxes sur l’électricité », a annoncé le Premier ministre, jeudi, dans une interview au Figaro. Bien que ces taxes augmenteront en 2025, ce ne sera que pour revenir au niveau observé « avant la mise en place du bouclier tarifaire » en 2021, sans dépasser ce seuil comme cela avait été initialement prévu. « Cela permettra une réduction des tarifs de l’électricité de 14 %, dépassant largement la diminution initiale de 9 % annoncée », a expliqué Michel Barnier.
Le gouvernement envisageait initialement d’élever la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) pour générer 3,4 milliards d’euros. Sa suppression était l’une des revendications du RN pour soutenir le pouvoir d’achat. « Vous pouvez déjà barrer cette mesure de notre liste, c’est un début prometteur », s’est réjoui jeudi un proche de Marine Le Pen, selon Les Echos.
Interrogée vendredi matin sur France 2, Maud Bregeon, porte-parole du gouvernement, a contesté l’idée qu’il s’agisse d’un cadeau à l’extrême droite : « C’est une demande qui a été émise par presque tous les groupes de l’Assemblée nationale », a-t-elle soutenu, ajoutant que les députés du groupe Ensemble pour la République « avaient proposé des amendements en ce sens ».
« Le pouvoir d’achat des Français est une cause soutenue non seulement par le Rassemblement national mais par l’ensemble des députés », a-t-elle conclu.
Réduction significative de l’Aide médicale d’État
Michel Barnier a annoncé jeudi son intention de réduire « considérablement » les prestations médicales couvertes par l’aide médicale d’État (AME), destinée aux personnes sans statut légal. En septembre, le Premier ministre avait déclaré qu’il n’y avait pas « ni totem, ni tabou » sur cette question, précisant qu’une réforme de l’AME sera entreprise dès l’année prochaine, avec pour objectif d’« éviter abus et détournements », une demande persistante de l’extrême droite et d’une partie de la droite en matière d’immigration.
« Des propos populistes », a réagi Matthias Thibeaud, référent en droit d’accès aux soins à Médecins du Monde. « Les bénéficiaires de l’AME ne peuvent accéder à certains soins, tels que dentaires, optiques, auditifs, qui restent trop coûteux, les empêchant ainsi d’en bénéficier », a-t-il précisé, répondant aux déclarations des élus du RN sur des interventions comme les anneaux gastriques ou la chirurgie plastique (qui ont représenté un budget infime de 0,001% de l’AME en 2023, selon France Inter).
« Quand on demande des sacrifices aux Français, il est juste de réduire l’AME », a défendu Maud Bregeon sur France 2. « La façon la plus efficace de réduire l’AME à long terme, c’est d’atténuer l’immigration clandestine en France. Néanmoins, en attendant, peut-on diminuer le panier de soins en vigueur ? La réponse est affirmative », a-t-elle poursuivi.
Adoucissement des charges pour les entreprises partiellement maintenu
Cette décision vise à apaiser les députés du Rassemblement national ainsi que les députés macronistes d’Ensemble pour la République. Sous la pression des deux camps, désireux de ne pas alourdir le coût du travail ni la contribution des entreprises, Michel Barnier a confirmé jeudi que les réductions de charges pour les salaires allant jusqu’à 2,25 SMIC ne seront pas amendées. C’est une décision prise après consultation des « représentants des entreprises concernées », a déclaré le Premier ministre, suite à un accord entre sénateurs et députés mercredi soir en commission mixte paritaire.
En assouplissant sa position sur ce sujet, le gouvernement pourra compter sur une économie de 1,6 milliard d’euros, à comparer aux 4 milliards initialement prévus pour les entreprises, comme annoncé par les députés et sénateurs après la commission mixte paritaire, mercredi soir.
Cependant, « c’est toujours non », a répondu Jean-Philippe Tanguy, député et président délégué du groupe RN à l’Assemblée nationale, aux Echos. Le groupe RN avait déjà exprimé par communiqué que « la version du projet de loi de finances pour la Sécurité sociale proposée par la commission mixte paritaire n’est pas satisfaisante en l’état », et continue de plaider pour la préservation des allègements de charges pour les TPE-PME.
Compromis sur les pensions de retraite, insuffisant pour le RN
Sur le sujet délicat des retraites, le RN n’a pas été convaincu par les concessions actuelles. Alors que le gouvernement prévoyait de reporter de six mois la revalorisation des retraites de base de 1,8 % au 1er juillet 2025, l’amendement adopté en commission mixte paritaire propose une augmentation de 0,8 % au 1er janvier, suivie d’un complément pour atteindre une hausse totale de 1,6 % en juillet pour les retraités dont les pensions (base et complémentaire) totalisent moins de 1 500 euros bruts.
Insuffisant pour Gaëtan Dussausaye, porte-parole du groupe RN à l’Assemblée nationale. « Un certain nombre de nos demandes sont connues depuis le début de la discussion budgétaire », a-t-il souligné vendredi sur France Inter. Pour le député des Vosges, « il subsiste cette désindexation, fondamentalement injuste, des pensions de retraite vis-à-vis de l’inflation », a-t-il ajouté, mentionnant que « le gouvernement peut encore amender » le texte d’ici lundi.