Le nouveau gouvernement du Premier ministre François Bayrou fait face à une quinzaine effrénée alors qu’il lutte pour établir sa crédibilité et repousser les tentatives multipartites visant à le tuer à ses débuts.
« Je suis convaincu que les politiques que je présente et l’équipe gouvernementale que j’ai formée garantiront que nous ne serons pas censurés », a déclaré Bayrou quelques heures seulement après avoir annoncé la composition de son gouvernement lundi soir.
Bayrou, 73 ans, un opérateur avisé qui se présente comme un centriste, est le quatrième Premier ministre du président Emmanuel Macron pour 2024.
Son prédécesseur, Michel Barnier, a quitté ses fonctions le 8 décembre après trois mois de mandat à la suite d’un accord parlementaire entre l’extrême droite et la gauche pour l’évincer.
L’accord lui a valu l’infamie d’être le Premier ministre ayant le mandat le plus court depuis le début de la Cinquième République en 1958.
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Bayrou et ses acolytes pourraient connaître un sort similaire.
« Aucune des conditions du pacte de censure n’est remplie dans la composition de ce nouveau gouvernement », a déclaré le leader du Parti socialiste Olivier Faure.
Il a indiqué que son groupe pourrait voter une motion de censure dès le 14 janvier, lorsque Bayrou prononcera sa déclaration politique.
Les anciens Premiers ministres Élisabeth Borne – chargée du portefeuille de l’Éducation – et Manuel Valls, ministre de l’Outre-mer, seront scrutés de près, tout comme l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Le nouveau ministre de la Justice s’est engagé à travailler main dans la main avec le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, l’un des 19 ministres du gouvernement Barnier retenus.
S’attaquer au déficit
Borne, qui a démissionné de son poste de Premier ministre en janvier après 20 mois à ce poste, a adopté un ton pragmatique.
« Je suis le sixième ministre de l’Éducation en un peu plus de deux ans et demi et je suis pleinement consciente des défis et des attentes de la communauté éducative », a-t-elle déclaré.
Elle a dit vouloir enrayer la montée des incivilités, des insultes et des violences ainsi que les atteintes à la laïcité dans les écoles.
Eric Lombard, l’ancien patron de la Caisse des Dépôts et Consignations, institution financière publique, semble avoir reçu le calice empoisonné en tant que ministre de l’Economie.
Après sa nomination, il a identifié le déficit comme un problème endémique.
Les hommes politiques français sont confrontés à une dette nationale qui a atteint 113,7 pour cent du PIB (3 303 milliards d’euros) fin septembre.
Barnier espérait réduire le déficit public de 6,1 % du PIB cette année à 5 % d’ici fin 2025.
Lombard et Bayrou doivent élaborer un budget 2025 qui s’attaque aux mêmes statistiques sinistres par l’intermédiaire de l’Assemblée nationale, pleinement conscients que la tentative de Barnier de considérer les réalités a conduit à sa chute le 4 décembre.
Bayrou a au moins trouvé un peu de réconfort. Juste avant Noël, trois organisations patronales et quatre des cinq principaux syndicats ont souligné ensemble les risques économiques et sociaux de l’instabilité.
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Une « provocation »
Le Rassemblement national (RN), le plus grand groupe d’extrême droite à l’Assemblée nationale, a indiqué qu’il ne s’opposerait pas dans un premier temps au nouveau gouvernement.
Le parti de centre-droit Les Républicains (LR) a exprimé un soutien conditionnel. Le chef du parti Laurent Wauquiez a qualifié le soutien de LR de très exigeant et a prévenu qu’il pourrait être retiré en fonction de l’orientation de Bayrou.
Cependant, Faure l’a qualifié d’administration d’extrême droite et de provocation.
« Ce n’est pas un gouvernement, c’est une provocation », a déclaré Faure sur les réseaux sociaux. « L’extrême droite au pouvoir sous le regard de l’extrême droite. »
Marine Le Pen, la chef du RN, a prévenu mardi que les jours du nouveau gouvernement français étaient comptés, prédisant une élection présidentielle dans quelques mois au lieu de 2027.
Après sa déclaration politique, Bayrou s’attend à ce qu’une motion de censure soit déposée par le parti d’extrême gauche La France Insoumise (LFI).
Bayrou, qui dirige le parti MoDem, devra déployer ses talents légendaires de rassembleur et de charmeur non seulement pour survivre un peu plus longtemps que Barnier, mais aussi pour empêcher son pays de sombrer dans un nouveau chaos politique.
(Avec les fils de presse)