Alors que l’instabilité demeure présente, et que la censure de l’administration dirigée par François Bayrou pourrait entraîner la désignation de ministres supplémentaires, 42mag.fr a entrepris de recenser leur quantité au cours des huit années écoulées. Cette rotation fréquente constitue un défi complexe pour les divers protagonistes des secteurs de la santé et de l’éducation, en particulier.
Le suspense plane autour de François Bayrou : parviendra-t-il à faire adopter le budget ? Tandis que certains membres de la gauche menacent déjà de déposer une nouvelle motion de censure contre le Premier ministre si le gouvernement utilise l’article 49.3 pour faire passer le projet de finance prévu pour être débattu en commission mixte paritaire le jeudi 30 janvier. Une éventuelle chute de son gouvernement entraînerait le besoin de désigner un nouveau chef du gouvernement ainsi que de nouveaux ministres. C’est dans ce contexte que 42mag.fr s’est intéressé à dresser le bilan du nombre de renouvellements ministériels sous la présidence d’Emmanuel Macron, depuis sa première élection en 2017. Le constat est frappant : le gouvernement a comptabilisé 158 ministres. Un sommet jamais atteint sous la Vème République.
Ce décompte a également été réalisé par d’autres, dont Gérard Larcher. Le président du Sénat issu du parti Les Républicains a dénombré 160 ministres, soit deux de plus d’après 42mag.fr. Cette même estimation a également été partagée par Édouard Philippe, le seul candidat déclaré pour la présidentielle de 2017, lors d’une rencontre avec ses partisans. Selon le dirigeant du parti Horizons, cela équivaut en moyenne à « un ministre tous les deux mois dans chaque ministère ».
Un taux de renouvellement variable selon les ministères
Trois ministères en particulier se sont illustrés par leur turnover élevé. Le ministère de la Santé, par exemple, a vu neuf ministres se succéder en huit ans, malgré la longue direction d’Olivier Véran. À l’Éducation nationale, sept ministres ont été nommés, malgré la période entière du premier mandat assurée par Jean-Michel Blanquer. Quant au ministère des Collectivités territoriales, il a accueilli six ministres sur une période limitée de quelques mois, de 2022 à 2023.
Pour les différents intervenants des secteurs de la santé et de l’éducation, ce sont des situations complexes à gérer, car ils doivent sans cesse s’adapter aux nouvelles directions imposées par chaque nouveau ministre. De plus, les prédécesseurs, comme Olivier Becht, qui supervisait le commerce extérieur jusqu’à il y a un an, se plaignent également de cette instabilité. Rencontré à proximité du bureau d’actuel ministre en charge, Laurent Saint-Martin, Becht a déclaré : « C’est la troisième ou quatrième fois que je fais le briefing d’un successeur ». Un autre responsable local, croisé près du ministère, exprime sa frustration après avoir dû réexpliquer complètement le dossier de la fonction publique hospitalière : « Je n’en peux plus (…) Les ministres nous disent qu’ils ne contrôlent pas la situation et ignorent combien de temps ils seront en poste ! »
En coulisses, les conseillers rencontrent également des difficultés. Très peu ont réussi à conserver leur poste durant ce deuxième quinquennat ; une dizaine de ces « résistants » ont créé un groupe de messagerie pour s’entraider mutuellement. Un ancien directeur de cabinet a confié à 42mag.fr que ces revirements pèsent lourdement sur les finances, en particulier lorsque le champ d’action d’un ministère est modifié lors d’un remaniement : il est alors indispensable de changer les plaques, les modèles de documents administratifs, le site web, etc., ce qui entraîne des dépenses de plusieurs centaines de milliers d’euros selon lui.
L’instabilité politique a accéléré le rythme des changements ministériels, surtout depuis la dissolution. Emmanuel Macron doit s’ajuster aux choix de ses Premiers ministres, qui eux-mêmes doivent composer avec les dynamiques de l’Assemblée nationale. Même durant son premier mandat, le nombre de ministres avait déjà atteint des sommets, et cette tendance s’est amplifiée après sa réélection en 2022. Le président a souvent cherché à donner un nouveau souffle à son gouvernement par ces remaniements.