Paris (AFP) – Le Premier ministre français François Bayrou a survécu jeudi à son premier vote de censure au Parlement après que la motion, présentée par l’opposition de gauche, n’ait pas réussi à gagner du terrain auprès de l’extrême droite.
Le défi à l’Assemblée nationale est intervenu après la déclaration de Bayrou cette semaine sur son programme politique gouvernemental, dans laquelle il a ouvert la porte à de nouvelles négociations sur une réforme des retraites en 2023 « sans tabou », mais a également déclaré que les déficits « excessifs » de la France devaient être réduits le budget de cette année.
Ce discours a suscité la condamnation de la plupart des partis d’opposition au Parlement où Bayrou – en fonction seulement depuis le mois dernier – est bien loin d’avoir la majorité absolue, ce qui rend son gouvernement très vulnérable à tout vote de censure qui, en cas de succès, l’obligerait à démissionner.
Jordan Bardella, le leader du Rassemblement national (RN) d’extrême droite, l’a qualifié de « paroles en l’air » d’un « homme de continuité sans âme ».
Mais les partisans de la motion de censure, présentée par le parti d’extrême gauche La France Insoumise (LFI), n’ont pas réussi à obtenir le soutien du RN.
« Nous ne pensons pas qu’un vote de censure doive être un gadget pour créer du buzz », a déclaré le député RN Jean-Philippe Tanguy avant le vote.
Le vice-président du RN, Sébastien Chenu, a ajouté avant le vote que son parti jugerait le gouvernement « non pas sur ses paroles, mais sur ses actes ».
Tanguy a toutefois prévenu que le RN pourrait encore se rallier à Bayrou sur son budget pour 2025, qui est en retard après le renversement du précédent gouvernement de Michel Barnier en raison de ses plans d’austérité.
L’annonce du budget du nouveau gouvernement constituerait un « moment de vérité », a déclaré Tanguy.
Le Premier ministre français s’engage à rouvrir les négociations sur la réforme des retraites dans un contexte de crise de la dette croissante
« Un autre chemin »
La quasi-certitude de la défaite à l’approche du vote n’a guère entamé la combativité de LFI.
« Monsieur le Premier ministre, les jours de mécontentement de votre gouvernement sont comptés », a déclaré le coordinateur de LFI Manuel Bompard au début du débat sur la motion de censure.
« Et quand il tombera, le monarque suivra », a-t-il déclaré, en référence au président Emmanuel Macron, qui a nommé le mois dernier Bayrou quatrième Premier ministre français d’ici un an.
Bayrou, quant à lui, a accusé l’extrême gauche de tenter d’entraîner la France sur la voie des « luttes intestines ».
Le Premier ministre a salué la décision des socialistes de refuser le soutien à la motion LFI, bien qu’ils soient alliés avec LFI depuis les élections législatives de l’année dernière.
La défection des socialistes montre qu' »une autre voie vers la compréhension est en train de s’ouvrir », a déclaré Bayrou.
Le leader incendiaire de LFI, Jean-Luc Mélenchon, a déclaré jeudi soir que Bayrou « vient de marquer un point » grâce à « ceux qui dirigent aujourd’hui les socialistes et nous ont affaiblis ».
Mais il a nié que l’alliance de gauche du Nouveau Front populaire (NFP) se soit brisée malgré le refus des socialistes de soutenir le renversement de Bayrou.
De leur côté, les écologistes et les communistes, qui font tous deux partie du NFP, ont clairement fait savoir qu’ils comptaient poursuivre les discussions avec le gouvernement malgré leur vote en faveur de la motion.
Le vote de censure a obtenu le soutien de 131 députés, bien loin des 288 nécessaires pour être adopté.
La politique française a été plongée dans le chaos l’année dernière lorsque Macron a convoqué des élections pour sortir de l’impasse politique, mais le vote a ramené une Chambre basse désespérément divisée.
Macron a reconnu que sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale avait conduit à des « divisions » et à une « instabilité ».
Les règles constitutionnelles signifient que de nouvelles élections législatives ne peuvent être convoquées avant juillet.