Jordan Bardella, dirigeant du Rassemblement national, souhaite abolir ce qu’il désigne comme le « scandale des visas pour soins », en ciblant particulièrement la population algérienne. Cependant, il a tendance à exagérer les données statistiques sur le sujet.
La proposition de certains partis politiques, notamment ceux de droite et d’extrême droite, est de mettre fin à l’octroi d’autorisations de soins aux étrangers malades. Les représentants du parti Les Républicains ont ainsi remis une proposition de loi dans ce sens. Jordan Bardella, leader du Rassemblement national, a pris la parole le 4 février sur les chaînes Europe 1 et Cnews pour confirmer son intention de supprimer ce dispositif s’il accède au pouvoir. Selon Bardella, cette mesure profite principalement aux citoyens algériens, et il la remet en question dans le contexte des tensions actuelles entre la France et l’Algérie concernant les visas.
Il a déclaré : « Je mettrais fin au scandale des visas pour soins qui fait que 40% des Algériens qui demandent un visa sur le sol français sont des visas pour soin, c’est-à-dire des visas pour se faire soigner dans notre pays, aux frais de la princesse ». Cette affirmation est-elle vraie ou fausse ?
Environ 7% des résidences pour soins accordées aux Algériens
Jordan Bardella semble faire une confusion en parlant de « visas pour soins », mélangeant ainsi les visas d’entrée en France et les titres de séjour permettant de rester sur le territoire. En réalité, la France ne délivre pas de visas pour soins mais des titres de séjour spécifiques pour raisons médicales.
Les données les plus récentes concernant ces titres de séjour sont issues de l’année 2022, d’après le rapport de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) publié en décembre 2024. D’après ces informations, 2 103 Algériens ont sollicité un titre de séjour pour soins cette année-là. Comparé aux 29 271 titres délivrés à des Algériens par le ministère de l’Intérieur, toutes catégories confondues, les demandes pour soins représentent seulement 7% des résidences accordées, bien loin des 40% mentionnés par Bardella.
Pour ajouter une perspective plus large, ajoutons que 131 264 visas ont été délivrés à des citoyens algériens en 2022, en plus des 29 271 titres de séjour. Dans ce cas, les demandes pour raisons médicales comptent environ 1,3% de l’ensemble des résidences et visas octroyés aux Algériens.
Cette estimation est même optimiste, car elle n’inclut que les demandes déposées par les Algériens. Le rapport de l’Ofii ne fournit pas le chiffre exact de titres effectivement attribués pour soins, particulier aux Algériens, mais le taux global d’acceptation est de 61,5%. En appliquant ce pourcentage aux demandes algériennes, cela signifierait que seule une proportion d’environ 1 293 titres pour raisons médicales a réellement été accordée, soit environ 4% des résidences de 2022, ou 0,8% de l’ensemble des résidences et visas délivrés.
Un coût dissimulé
Malgré une tendance à la baisse dans les demandes, comme noté par l’Ofii, les Algériens représentent toujours le principal groupe à demander ces titres de séjour, bénéficiant de l’accord franco-algérien de 1968. Cet accord, que le ministre de l’Intérieur souhaite revoir, facilite l’obtention des titres pour soins. Les Ivoiriens, les Géorgiens et les Congolais suivent en nombre de demandes pour soins en France.
L’Ofii indique que les maladies courant parmi les étrangers bénéficiant de soins incluent des infections comme le VIH ou des hépatites virales (27,1%), des maladies du système sanguin (21,3%), ainsi que des troubles endocriniens, nutritionnels et métaboliques (18,4%).
Le rapport met en lumière que « les soins pour les étrangers malades via cette procédure ne connaissent pas de limitation et ont un coût invisible ». Il est précisé que l’impact économique des traitements médicaux ou de certains médicaments coûteux est considérable. Cela montre que les soins ne sont pas limités pour ces étrangers, avec un coût qui peut être élevé mais reste « invisible car globalement assumé par l’Assurance-maladie ». C’est ce point flou que la proposition de loi des Républicains souhaite clarifier en abrogeant ce dispositif.