Michel Canévet, sénateur du centre du Finistère, propose un appel à « une plus grande entraide dans le secteur » de la pêche, qui nécessiterait « une imposition » dans le but de financer de l’innovation technologique.
Le vendredi 22 septembre, Michel Canévet, sénateur centriste du Finistère, a proposé sur franceinfo l’idée d’instaurer une « taxe » sur les produits de la pêche étrangère commercialisés en France, dans le but de « supporter les pêcheurs français dans leur transition vers des sources d’énergie plus propres ».
Puisque le gouvernement a déclaré mettre un terme aux subventions liées au carburant pour les pêcheurs à compter du 15 octobre, cela a causé un tollé parmi les pêcheurs français, qui se sont rassemblés aux Assises de la pêche à Nice et ont exprimé leur sentiment de « trahison ». D’après le sénateur, « il est impératif que les technologies progressent rapidement » pour que la pêche française ne soit plus dépendante du diesel. « Nous plaçons beaucoup d’espoirs dans l’hydrogène, mais il reste encore beaucoup à faire en matière de développement technologique », a-t-il déclaré. En attendant, selon lui, une « solidarité renforcée dans l’ensemble de la filière », qui inclurait une taxe sur la pêche étrangère, pourrait être la solution à la situation précaire des pêcheurs français.
franceinfo : Comprenez-vous les inquiétudes de cette profession ?
Michel Canévet : Je suis sensible aux préoccupations des pêcheurs. La majorité de la pêche en France, en termes de volume, provient du chalutage. La technique du chalut, qui consiste à traîner un filet sur le fond de l’océan, requiert une grande puissance de moteur et donc une consommation importante de carburant. Cela a un impact significatif sur l’équilibre économique des bateaux de pêche. Le coût du carburant est actuellement élevé, atteignant 0,90 euro (détaxé) par litre. Les pêcheurs bénéficient d’une aide de 0,20 euro par litre seulement jusqu’au 15 octobre. Mais tous les acteurs de la pêche n’y ont pas accès. C’est dû au fait qu’il y a un plafond par entreprise de pêche pour obtenir ces 330 000 euros. Si les pêcheurs-artisans, qui ne possèdent qu’un seul bateau, ont encore une marge avant d’atteindre ce plafond de 330 000 euros, les armateurs, qui possèdent plusieurs bateaux et constituent la majorité des volumes, ont déjà épuisé cette aide dès le début de l’année. Ils ne peuvent plus y prétendre. Ces derniers rencontrent actuellement des difficultés financières, car ils ne reçoivent plus d’aide et le coût du carburant représente une part importante de leurs charges.
Quelle serait la meilleure solution à adopter ?
Idéalement, il serait souhaitable de supprimer le plafond afin que l’aide puisse être accordée à tous. Le problème de la pêche est qu’à l’heure actuelle, il n’existe pas d’alternative viable au moteur thermique. En d’autres termes, il n’y a pas de navires capables d’effectuer la pêche avec un autre type de propulsion que le diesel. Les technologies doivent progresser rapidement. C’est une situation analogue à celle que connaît le secteur de l’aviation. Dans l’état actuel des choses, avec le prix du poisson relativement bas et le coût du carburant très élevé, la rentabilité pour les propriétaires de bateaux de pêche est compromise.
Ne serait-il pas préférable de renouveler la flotte avec des bateaux moins consommateurs de carburant grâce à des aides financières ?
Effectivement, c’est une excellente idée. D’ailleurs, les pêcheurs ont déjà commencé à construire de nouveaux bateaux et à remplacer les moteurs des anciens pour réduire leur consommation de carburant. Les gains obtenus se situent autour de 20% en termes de consommation, ce qui est tout à fait appréciable. Cependant, cela reste insuffisant dans le contexte actuel. Ceux qui ont déjà réalisé ces améliorations n’y gagneront rien. Le ministère a lancé des appels à projets pour tenter d’expérimenter de nouvelles technologies, telles qu’un système partiellement alimenté par carburant et partiellement électrique. Nous avons aussi placer beaucoup d’espoirs dans l’hydrogène, mais les technologies ne sont pas encore au point.
En attendant, comment les pêcheurs français parviennent-ils à gagner leur vie avec la pêche, surtout qu’ils sont confrontés à la concurrence étrangère, notamment britannique depuis le Brexit ? Ne faudrait-il pas instaurer une politique plus stricte au niveau européen pour tenter de sauver le secteur français ?
C’est une certitude, oui. Malgré le statut de grande puissance maritime de la France, nous importons près de deux tiers des produits de la mer que nous consommons. Nous plaidons pour une plus grande solidarité au sein de la filière. Cela signifierait que les produits de la mer importés, majoritairement étrangers, pourraient être taxés afin de soutenir les pêcheurs français et leur permettre de faire leur transition énergétique. Sans cette solidarité, il sera difficile de trouver les fonds nécessaires pour assurer cette transition énergétique.