Au Festival international du film de Marrakech, l’équipe de Brut s’est entretenue avec Nabil Ayouch, un réalisateur, et Nisrin Erradi, une actrice. Ils ont discuté ensemble de « Everybody Loves Touda », leur dernier film. Dans cette œuvre cinématographique, Nisrin Erradi joue le rôle de Touda, une jeune femme aspirant à devenir chikha, une chanteuse traditionnelle marocaine connue pour sa liberté d’expression sans retenue. « Everybody Loves Touda » est sorti dans les salles de cinéma le 18 décembre.
Nabil Ayouch raconte : « À chaque fois que l’on assiste à des événements tels qu’un mariage, un baptême, une circoncision, ou même un moussem, une chikha se met à chanter et tout le monde est emporté dans cette énergie mouvante, presque comme une transe. C’est ancré dans nos racines.«
Le public marocain a été profondément touché en découvrant ce film, se rapprochant de ces femmes qui font partie de leur quotidien. Ces figures sont à la fois admirées et critiquées, créant un lien ambivalent. Comme le souligne Ayouch, « Le personnage de Touda, incarné par Nisrin dans ce film, leur restitue une place, et leur rend leur dignité. »
Quand réalisateur et actrice s’accordent parfaitement
Nisrin Erradi évoque une entente parfaite avec Nabil Ayouch durant le tournage : « Une harmonie s’est établie d’elle-même. On se complétait naturellement l’un l’autre. » Ayouch ajoute : « J’ai appris à vraiment connaître Nisrin, l’écouter, découvrir qui elle était au plus profond, et c’est ainsi qu’un vrai pacte de confiance s’est installé entre nous. »
Cette alchimie leur a permis de créer quelque chose de solide, bien au-delà des mots, grâce à une compréhension profonde. « Il y avait des moments où j’espérais quelque chose, et je pense qu’en quelque sorte, je le lui faisais comprendre à travers des vibrations, elle les percevait, et elle se lançait, » explique le metteur en scène.
Une production qui met en lumière les invisibles
Nabil Ayouch décrit « Everybody Loves Touda » comme faisant partie d’un projet plus vaste : « J’ai le sentiment qu’avec tous mes films, j’ai essayé de façonner un ensemble qui aborde ces questions identitaires et donne une place à ceux que la société préfère ignorer, ces gens en marge. »
Ce film a permis à Ayouch de renouer avec sa propre identité complexe et de donner du poids à « une sorte d’armée silencieuse, vivant autour de moi, dans ce pays, pour s’exprimer et apparaître avec fierté et respect. » Une démarche qui le remplit de satisfaction.