Les guerres intra-utérines du camp socialiste ont toujours été pléthoriques. Des affrontements de la première internationale entre marxistes et anarchistes jusqu’à aujourd’hui, en passant par les fractionnements tragicomiques des chapelles révolutionnaires durant les années 60/70, rien n’a véritablement changé dans ce coin-là de la politique, en témoigne la récente sortie de Besancenot. Porte-parole d’un parti trotskiste moribond, le NPA, il a récemment cru bon de dénoncer chez Mélenchon des poussées « souverainistes » (brr), « nationalistes » (re-brr) voire « chauvines » (nous revoilà dans ces heures sur lesquelles la lumière ne s’est jamais posée).
De telles accusations ont néanmoins le mérite de mettre en valeur l’une des caractéristiques du trotskisme, sous sa forme prise par l’ex-LCR. Il nous a donc paru important de revenir sur ce sujet, afin de remettre en cause certains fondamentaux de cette idéologie, tout en discutant de ce que pourrait être au final l’internationalisme. En effet, à écouter les propos de Besancenot (« Et je crois qu’il faut assumer son internationalisme parce que pour moi la seule frontière qui vaille, c’est une frontière sociale qui oppose les exploiteurs et les exploités. Et à titre personnel, en tant que salarié, j’ai plus de points communs avec un chômeur, un salarié allemand qui résiste au capitalisme qu’avec un capitaliste français »), l’internationale sera sans-frontière ou elle ne sera pas…
Retour sur les fondements
Tout d’abord, il est important de revenir sur les fondements doctrinaux qui sous-tendent la vision du monde d’un Besancenot. Ce dernier, derrière sa sincérité et son air bon enfant, demeure quelqu’un de solidement politisé, avec une idéologie dont il est bon de retracer les fondements sous peine de ne pas comprendre les raisons de ses énervements. Besancenot est issu du NPA, et ce NPA est lui-même issu de la défunte Ligue Communiste Révolutionnaire. Ce parti, en son temps, était d’inspiration trotskiste, et s’opposait donc à la fois aux marxistes-léninistes et aux libertaires – rappelons d’ailleurs, au passage, que ces fieffés « révolutionnaires » se revendiquent de l’homme qui massacra le soviet autonome de Krondstadt, c’est-à-dire l’une des plus héroïques et des plus tragiques tentatives de démocratie directe à ce jour.
Nonobstant une évidente idéologie anti-stalinienne, les trotskystes, loin de s’émanciper radicalement de l’U.R.S.S. (comme le firent les anarchistes, Claude Lefort ou Castoriadis), croyaient encore possible sa récupération, en tant qu’État ouvrier dégénéré. Les pablistes (du nom de Pablo, pseudonyme de Michel Raptis, fondateur de ce courant majoritaire au sein de la IVe Internationale), le pensaient d’autant plus qu’ils étaient parmi les plus prompts à lui reconnaître des mérites lors d’inflexion « de gauche ». Cette vision complètement hallucinée les poussera bien souvent à saluer des personnages aussi peu reluisants que Mao, Gomulka, Castro ou Tito. Le philosophe Castoriadis, trotskyste pendant un temps au sein du groupe Socialisme ou Barbarie, eut d’ailleurs cette admirable expression pour désigner cette chapelle : « la fraction en exil de la bureaucratie soviétique ».
« Le trotskisme est bien divers, et l’on ne saurait confondre le courant lambertiste, dont est issu Mélenchon, très laïque, républicain et plus attaché à l’idée de nation , avec le courant pabliste, dont le caractère est beaucoup plus “ libéral ”. »
S’il est important de revenir à ces guerres picrocholines au sein du mouvement ouvrier, ce n’est pas tant par nostalgie que par nécessité de compréhension. En effet, le trotskysme est bien divers, et l’on ne saurait confondre le courant lambertiste (du nom de son fondateur, Pierre Lambert, pseudonyme de Pierre Boussel) dont est issu Mélenchon, très laïque, républicain et plus attaché à l’idée de nation , avec le courant pabliste, dont le caractère beaucoup plus « libéral » ne cessera de grandir avec le temps. C’est ce courant qui sera le plus ouvert aux nouvelles formes de revendications sociétales émergeant durant la seconde moitié du XXe siècle, de la légalisation des drogues douces à l’antiracisme multiculturaliste des Indigènes de la République. Comme le rappelle Philippe Raynaud dans son ouvrage L’extrême gauche plurielle :
« C’est par là que les militants de la Ligue pouvaient le mieux se distinguer des “staliniens ” du vieux Parti communiste, qui sont longtemps restés attachés à des valeurs et à des moeurs “ traditionnelles ”, celles de la majorité des ouvriers comme des fonctionnaires républicains : la Ligue a soutenu les mouvements régionalistes corse, occitan ou breton, elle a joué un rôle important dans la mobilisation en faveur de la liberté de l’avortement, elle a assez vite accepté de défendre les homosexuels et même les consommateurs de “ drogues douces ”, elle s’est aisément adaptée à la culture rock et l’engagement de ses militants enseignants en faveur des pédagogies nouvelles était assez adapté à l’ambiance de la période qui a suivi Mai 1968.
Les expériences militantes de ses dirigeants et leurs choix stratégiques allaient d’ailleurs dans le même sens : les principaux dirigeants de la Ligue, dont beaucoup viennent de familles décimées par la Shoah, se sont formés dans la lutte contre la guerre d’Algérie et contre l’OAS et il est resté de tout cela une sensibilité antiraciste et antifasciste exacerbée, doublée d’un profond refus des mythes nationaux français, qui n’a eu aucune peine à trouver des échos dans les mobilisations ultérieures, de SOS Racisme à Ras l’front et aux Indigènes de la République. »
« A l’évidence, les trotskystes à la Besancenot ne se sont pas départis de cette vision irénique de la mondialisation. Pour eux, il ne s’agit pas d’un phénomène mauvais en soi, par essence, mais bien d’une nature capitalistique qui l’empêche de réaliser la “ vraie ” mondialisation. »
International et transnational
Venons-en désormais au noeud du problème. La vision de Besancenot de l’internationalisme est claire et nette : pas de patrie, pas de nation, pas de frontière. Il le dit lui-même : « Je crois qu’il faut assumer son internationalisme parce que pour moi la seule frontière qui vaille, c’est une frontière sociale qui oppose les exploiteurs et les exploités ». Or c’est justement là que la question se pose : doit-on soutenir une abolition des patries et des frontières sous prétexte d’internationalisme ? On peut en douter. Le problème de nombreux mouvements marxistes apparaît clair : une incapacité ontologique à aborder la notion de frontière sans crispation. Les marxistes les plus obtus ont, en effet, toujours été de ceux qui par intransigeance préféraient troquer la difficile dialectique entre particulier et universel pour l’idyllique lubie d’un monde uni par la lutte des classes. Telle est la vision du vieux Marx, inspiré entre autres par les Lumières et l’économisme de l’école classique. Ce dernier pensait en effet que le libre-échange aurait pour conséquence la formation d’un prolétariat mondial, uni par un internationalisme abstrait, et qu’il ne fallait donc en rien le freiner. Dans une vision étroitement « luttiste-de-classiste » (Péguy) il pensait, malgré une certaine lucidité par rapport aux dégâts causés par le libre-échange, que l’intensification de la concurrence mondiale hâterait la venue de la Révolution sociale.
À l’évidence, les trotskystes à la Besancenot ne se sont pas départis de cette vision irénique de la mondialisation. Pour eux, il ne s’agit pas d’un phénomène mauvais en soi, par essence, mais bien d’une nature capitalistique qui l’empêche de réaliser la « vraie » mondialisation. La moindre discussion avec le militant de base du NPA s’achèvera par la même litanie à propos de l’union des prolétaires du monde entier, la fin de la propriété privée, des frontières etc. L’internationalisme sera mondialiste ou il ne sera pas. Pourtant, la raisonnement butte sur une impasse. Rien qu’étymologiquement, le mot lui-même s’oppose à cette vision : dans internationalisme, il y a le préfixe inter-, qui ne signifie en aucun cas « absence de » (a-) ou « contre le » (anti-), mais bien « entre ». Or, pour qu’il y ait une relation « entre » des choses, il faut déjà qu’il y ait des entités distinctes ; de la même manière, on ne dialogue pas avec soi-même à moins d’être fou. Il faut donc qu’il y ait à la base des peuples, des nations, des collectifs humains – et non une poussière d’individualités atomisées, liées par une commune appartenance au camp des opprimés – pour qu’il y ait coopération.
La confusion est apparente : ce que désigne Besancenot par « internationalisme », n’est en fait que le plus simple transnationalisme, tel que promu par la mondialisation. Étrange reprise d’un imaginaire proprement capitaliste, cet internationalisme ne fait au final que retourner ce qui constitue le propre du monde des grandes entreprises et des grands patrons, espérant pouvoir les battre sur leur propre terrain – comme s’il était possible de gagner à un jeu où les dés sont pipés d’avance. L’on retrouve ainsi ce qui a toujours fait la caractéristique du capitalisme depuis ses débuts : l’illimitation. L’abolition des frontières se calque sur le monde du Capital, qui ne connaît aucune patrie, de même que sur les univers inhumains de la Science et de la Technique. C’est ainsi qu’une interprétation rigide de Marx aboutit à faire le jeu de ce capitalisme qui, toujours d’après Marx, servirait de tremplin vers l’avènement d’un monde socialiste. Tare d’une mouvance révolutionnaire qui n’a pu tirer les leçons d’un XXe siècle jonché de ses erreurs, il est bon de se souvenir que l’idée d’une abolition des différences sous le prisme de la lutte des classes n’a jamais été fructueux, tant cela a suscité les oppositions viscérales des peuples concernés. L’U.R.S.S. voulant abolir les nations n’a fait qu’in fine exacerber le sentiment nationaliste, toujours plus petit, concentré et fragmenté ; une situation similaire se déroulant aujourd’hui face à une Union Européenne toute tendue vers l’idéal postnational.
« Plutôt citoyen du monde, ce slogan de salonnard du XVIIIe siècle repris en boucle aujourd’hui par les bien-pensants, que citoyen d’une patrie, le transnationaliste se veut complètement déraciné. »
Au risque de frustrer les bonnes consciences, les points communs entre opprimés sont bien loin de compenser les énormes différences anthropologiques qui peuvent exister entre diverses populations. Un Chinois opprimé par le pouvoir postmaoïste ultralibéral, n’est pas exactement lié par on ne sait quel lien chimérique de classe à l’ouvrier français subissant le patronat limité par un code du travail en béton. Tant au niveau des institutions que des moeurs. Cette incapacité à reconnaître l’Autre reste hélas l’un des autres grands travers du mouvement marxiste historique. Le militant, tel que symbolisé par notre facteur, n’arrive pas à imaginer le fait qu’il y ait des différences, et qu’une saine entente n’implique en rien leur abolition ou leur fusion. Louise Michel dût ainsi faire face en son temps à l’incompréhension de ses camarades lors de la révolte des Canaques où, comble du paradoxe, certains exilés communards prirent part aux représailles gouvernementales contre ces tribus considérées comme arriérées.
Un tel aveuglement empêche ces orthodoxes d’envisager l’universel comme enraciné, l’international comme coopératif et non négateur des particularismes. Plutôt citoyen du monde, ce slogan de salonnard du XVIIIe siècle repris en boucle aujourd’hui par les bien-pensants, que citoyen d’une patrie, le transnationaliste se veut complètement déraciné. Et quand un ouvrier, subissant une délocalisation, se révolte contre cette concurrence étrangère, il ne trouve qu’une réponse à ce mécontentement : l’invective moralisante. Si les frontières c’est fâchô, et si les nations c’est chôvin, il est évident que la façon d’aborder l’ouvrier de base ne peut plus que se résumer à un dialogue de sourd, où le trotskiste, du haut de sa cime de sachant, lui explique doctement en quoi ses colères contre les Chinois sont xénophobes, comment celui qui reprend son job est en fait un allié, et qu’au final la nation est une bête immonde. Résultat : l’ouvrier le fuit comme la peste – et un Poutou fera toujours office d’arbre cachant la forêt dans ces milieux – voire se réfugie dans le discours véritablement xénophobe et chauvin d’un Front National.
Le patriotisme et la révolution
L’autre grande haine des besancenotistes demeure celle visant la patrie. Le degré de mépris qui suinte des coulées de bave du camarade lorsqu’il évoque le « drapeau bleu-blanc-rouge » n’a guère d’égal. Néanmoins, cela n’a pas toujours été l’avis des révolutionnaires. Orwell, grand patriote anglais, disait en effet en 1941, qu’il « faut que nous expliquions avec plus de carté que cela n’a été fait jusqu’à présent qu’aujourd’hui un révolutionnaire doit être un patriote et un patriote un révolutionnaire ». La patrie, cette belle idée, est avant tout un vécu : c’est une fraternité. Si elle a pu être instrumentalisée dans l’Histoire comme un cheval de Troie belliciste, elle a surtout été vectrice d’un rapport au collectif différent de l’égoïsme égocentrique. Il n’y a point de révolution sans patriotisme, l’Histoire ne cesse de nous le démontrer. Les cris de « vive la Nation » ont retenti dans l’histoire française de Valmy jusqu’au combat contre les nazis, et l’un des plus beaux et plus tragiques événements, la Commune de Paris, se faisait autant – sinon moins – en réaction à la bourgeoisie défaitiste qu’à l’invasion prussienne. Patriotisme et révolution vont toujours de pair.
L’appartenance à un collectif est en effet indispensable dans l’idée même de révolte. Pas d’insurrection sans socialisation : si l’indignation est individuelle, la mobilisation est mouvement de groupe, de foule. L’un ne peut aller sans l’autre, car l’individu est non seulement imprégné des valeurs de sa société, mais il est aussi impuissant sans lien social qui le lie aux autres, à un tout qui le dépasse. L’atomisation privatise, individualise et déstructure : on n’est jamais si faible que lorsque l’on se croit seul au monde. « L’estime qu’on a de soi-même dépend de celle qu’on peut avoir pour son pays ; et on n’a plus d’estime pour un pays qui ne s’estime plus lui-même. C’est ainsi. Un individu sans appartenance est un individu qui file doux, et baisse la tête si on le lui demande » (Régis Debray, Que vive la République). Il n’est pas anodin qu’en ces temps de narcissisme de masse, la patrie sente l’humidité des caves de l’Histoire où elle a été reléguée – si ce n’est le soufre. L’air du temps est à l’ego, le Moi règne en maître, se goinfre de marchandises et de droits en se croyant omnipotent. Rien de moins swag que le sacrifice pour son prochain ou une idée, rien de moins branché que le devoir d’un citoyen. La dépolitisation massive depuis plusieurs décennies n’en est qu’un symptôme tragique.
« Les déracinés sont des proies de choix pour le système capitaliste libéral, qui a tôt fait de remplacer un tel vide par des prothèses de type consumériste. »
A contrario, les populations les plus révoltées aujourd’hui démontrent régulièrement un sentiment fort d’identité. La patrie n’est pas un gros mot au Vénézuela : feu Chávez le scandait à chaque discours. Correa de même en Équateur. Plus radicalement, des Luddites aux Canuts, des paysans du Chiapas aux paysans du Larzac, les révoltes authentiquement populaires partent toujours d’une réaction collective concrète : défendre sa terre, ses ancêtres, ses prochains, sa patrie (qui ne se résume pas à l’État-nation), etc. On est loin du flottement hors-sol des « citoyens du monde » ou des « cosmopolites ». Les racines, mot qui doit rappeler Maurras et Barrès aux oreilles des trotskos, ont pourtant toujours été à l’origine même des insurrections. Elles sont là pour transmettre, des valeurs, des traditions, un passé, tout ce qui permet de faire lien et de dépasser l’instantané marchand. « L’amour du passé n’a rien à voir avec une orientation politique réactionnaire. Comme toute les activités humaines, la révolution puise toute sa sève dans la tradition. » (Simone Weil, L’enracinement). Les déracinés sont des proies de choix pour le système capitaliste libéral, qui a tôt fait de remplacer un tel vide par des prothèses de type consumériste.
Pour un internationalisme du XXIe siècle
Tout cela concourt à prendre le contre-pied d’une vision transnationale de l’internationalisme. Pragmatiquement, sans protectionnisme, les masses européennes, et françaises en particulier, courent à leur perte. Loin de nier le fait qu’il bénéficie aussi aux capitalistes, l’on ne saurait, par dogmatisme idéologique, refuser une telle mesure au nom de cela ou d’une révolution à venir. Le système libre-échangiste instaure la loi de la jungle au niveau continental, puis mondial ; il asservit des masses entières à un labeur de serf tandis qu’il met en concurrence les individus, les collectifs et les nations dans une guerre générale de tous contre tous. Loin de créer une identité planétaire d’opprimés, il attise les tensions entre populations, pulvérise les ensembles et favorise le tribalisme le plus grossier. Pendant ce temps-là, les élites mondialisées coulent des jours paisibles derrière leurs innombrables sécurités, bien heureuses de voir quelques sectes trotskistes vernir leur mode de vie d’un beau rouge « subversif » et « révolutionnaire ».
Pour contrer cette dévastation en marche, il est plus que temps de réhabiliter la notion de frontière. La frontière n’est pas un mur séparant les ethnies ou les communautés. Elle est au contraire un moyen de les préserver, et de réguler leurs rapports. Elle est surtout ce qui permet une certaine mesure dans les rapports entre faibles et forts. « La frontière rend égale des puissances inégales. Les riches vont où ils veulent, à tire-d’aile ; les pauvres vont où ils peuvent, en ramant » (Régis Debray). Par ailleurs, elle est mère de toute limitation. Là où l’imaginaire capitaliste veut absolument en finir avec toutes les limites – tabous, lois, coutumes, etc. – la frontière vient y mettre un frein : le Capital n’est plus libre de tout mouvement, les Hommes non plus (point de tourisme de masse destructeur). Que ce soit dans un régime capitaliste keynésien ou socialiste, les frontières seront toujours nécessaires, et l’idée de les abolir ne peut que promouvoir le règne de l’hubris permanent. L’écologie, loin d’en appeler à un dystopique « gouvernement mondial », crie au besoin de frontières : frontières à la croissance, frontières à la pollution par les déplacements humains, frontières aux marchandises délocalisées. On ne relocalisera pas les instruments de production sans elles. On ne résistera pas à l’impérialisme culturel des États-Unis d’Amérique sans cette cloison protectrice.
« Qu’on le veuille ou non, l’État-nation est aujourd’hui la dernière protection des travailleurs allant à vau-l’eau dans la mondialisation. »
Enfin, la nation restera toujours un élément clé dans la dialectique incertaine du particulier et de l’universel. Qu’on le veuille ou non, l’État-nation est aujourd’hui la dernière protection des travailleurs allant à vau-l’eau dans la mondialisation. Dernier endroit où réside un minimum de souveraineté – que Besancenot n’aime visiblement pas, injuriant Mélenchon de « souverainiste » notamment « sur l’euro » – il reste aussi le dernier lieu de redistribution sociale, de protection légale contre l’exploitation sans limites du patronat. On peut espérer un jour l’abolition de l’État, mais en attendant, sans mouvements de masse pour le vouloir, et à cause d’une désocialisation massive, son détricotage amène plus de souffrances que de biens, tout en aidant stratégiquement les capitalistes dans leur entreprise d’asservissement des peuples. Cette abolition n’implique de toute façon pas celle de la nation, en tant qu’intermédiaire nécessaire, entité permettant de faire lien entre le local et le global. Surtout lorsque celle-ci se définit explicitement par un triptyque universaliste tel que Liberté, Egalité et Fraternité.