Laurent Baron, le maire du Pré-Saint-Gervais, en Seine-Saint-Denis, a décidé de s’engager dans une démarche inhabituelle : passer une journée par semaine dans l’usine. Une initiative qui lui permet de garder un lien étroit avec les habitants et qui est saluée par une partie des citoyens. Cette décision est motivée par le désir de rester « connecté » à la vie de ses administrés et de se rendre compte de leurs réalités quotidiennes.
Dans son atelier de fabrication de pièces de moteurs d’avion, Laurent Baron est appelé « Monsieur le maire ». Depuis cinq ans, il est le maire socialiste du Pré-Saint-Gervais, en Seine-Saint-Denis, et a fait le choix de continuer d’aller à l’usine pour rester en contact avec la « vraie vie ».
Cette situation est fréquente à la campagne où de nombreux élus travaillent, mais bien plus rare en ville et quand on est à la tête d’une commune de près de 18 000 habitants. Ainsi, le vendredi, Laurent Baron quitte l’écharpe tricolore pour la chasuble dans son atelier, pour « garder les pieds sur terre ».
« Ça donne une vie et un schéma de pensée quand même différent. On vit une réalité que l’on a pas quand on est maire », explique-t-il. « Ça amène du concret dans la vie. Quand je dois arriver en mairie à 9 h, si j’arrive à 9 h 05, il ne se passe rien. Quand j’arrive à l’usine, je dois pointer. Il faut que je sois à l’heure, sinon mon chef va me dire : « ça ne va pas, c’est une rupture du contrat de travail, c’est un motif de licenciement ». »
Le maire est très sollicité par ses collègues sur l’actualité, notamment sur les retraites. Son quotidien le pousse à dénoncer la réforme : « Travailler un peu plus longtemps à l’usine, c’est différent. Les horaires d’équipe sont fatigants, le bruit est fatigant, la poussière et le travail en production sont gênants. Quand il faut produire 100 pièces par jour et qu’on est cadencés, on se dit qu’il faut sortir une pièce toutes les deux minutes sinon on ne réussira pas à la fin de la journée. C’est différent d’un travail intellectuel. »
Un choix pour rester connecter au quotidien des habitants
Jawad, qui travaille avec lui, admire sa démarche : « il y a même plein de salariés qui aimeraient avoir un maire comme lui dans leurs communes ». « Il n’est pas un politique comme les autres. Il y en a assez de ces politiques qui sont complètement déconnectés, qui restent enfermés dans une bulle et qui ne sont plus en lien avec les problématiques au quotidien de la société », ajoute-t-il.
Devant la mairie du Pré-Saint-Gervais, où Laurent Baron passe le reste de la semaine, l’initiative étonne. « Au moins, il est au cœur des choses », juge Pierrette. « Il n’est pas que dans l’administratif. Quand on dirige une ville, il faut être au cœur et non pas dans les sphères des paperasses ».
Même chose pour Nadia, qui a déjà été reçue par le maire pour un problème de logement : « Il est très compréhensif quand on le sollicite. Il comprend les classes moyennes ou les classes pauvres de la ville. Donc je me dis que c’est peut-être lié au fait qu’il reste encore travailleur, qu’il reste fidèle au terrain et à lui-même. » Même si certains pensent qu’une journée de travail peut nuire à la gestion d’une aussi grande ville, d’autres aimeraient que tous les élus soient contraints d’aller en entreprise au moins un jour par semaine.