La ministre française de la Culture, Rachida Dati, a confirmé samedi qu’un musée contenant une collection de dessins de journaux et de magazines ouvrirait en France en 2027, avec cinq ans de retard.
Le président Emmanuel Macron a annoncé en 2020 le projet d’une Maison des dessins de presse lors de son discours du Nouvel An à la nation.
Mais les propositions d’ouverture de la collection en 2022 ont été retardées en raison de la pandémie de coronavirus.
Et alors que la France s’apprête à fêter les 10 ans des attentats terroristes visant un magazine satirique Charlie Hebdo et un supermarché juif a fait 17 morts à Paris, Dati a déclaré sur les réseaux sociaux que l’idée proposée par l’une des victimes de la tuerie verrait le jour en 2027.
« Les dessins de presse sont une forme élaborée et précieuse d’impertinence démocratique que nous devons défendre », a ajouté Dati. « En 2025, l’engagement pris par le Président de la République sera tenu. »
Georges Wolinski, qui prônait un musée similaire depuis 2007, faisait partie des 11 personnes assassinées lors de l’attaque des frères Chérif et Saïd Kouachi dans les locaux de Charlie Hebdo à Paris le 7 janvier 2015.
Une 12e personne a été tuée alors que le duo prenait la fuite. Un jour plus tard, Amedy Coulibaly a tué une policière à Montrouge, au sud de Paris, et, le 9 janvier, a abattu quatre otages dans un supermarché juif de la porte de Vincennes, à l’est de Paris. Les trois hommes, décédés dans des échanges de tirs avec la police, ont revendiqué leur allégeance à des organisations terroristes.
Les Kouachis ont déclaré avoir mené une attaque de vengeance après que le magazine ait publié des caricatures du prophète Mahomet.
En septembre 2021, quelques mois avant sa mort, la veuve de Wolinski, Maryse, et six autres caricaturistes dont des survivants de l’attentat, ont appelé Macron à honorer sa promesse.
Dati a déclaré samedi qu’elle soumettrait des plans architecturaux à ses responsables. « Les travaux commenceront alors », a-t-elle ajouté. « Sous mon autorité, le ministère de la Culture supervisera le projet et son financement. L’objectif est une ouverture au public en 2027.
« Cette maison du dessin de presse sera un lieu de mémoire pour ceux qui sont tombés au service de la liberté d’expression, de la liberté de dessiner, de la liberté de caricaturer. A nous de ne pas les oublier. »
Dans le cadre des commémorations des attentats, Charlie Hebdo publiera mardi un double numéro spécial présentant les résultats d’un concours demandant aux lecteurs de dessiner Dieu, ainsi qu’un sondage sur l’attitude des Français à l’égard des caricatures religieuses, du blasphème et de la liberté d’expression.
L’Institut national de l’audiovisuel (INA) met également en ligne des images d’archives des événements.
L’héritage de la provocation
Depuis sa création en 1970, Charlie Hebdo est connu pour repousser les limites de la liberté d’expression, s’attirant souvent la censure pour son ton provocateur.
Les critiques accusent le magazine d’islamophobie, pointant du doigt les caricatures du prophète Mahomet qui, selon certains, associent l’islam au terrorisme.
Les défenseurs de la liberté d’expression en France considèrent la capacité de critiquer et de ridiculiser la religion comme un droit fondamental acquis au cours de siècles de lutte pour réduire l’influence de l’Église catholique.
En décembre 2020, 14 personnes ont été condamnées pour avoir aidé les frères Kouachi et Coulibaly à planifier et à mener les attentats.